Dévoiler les conspirations et le paranormal !
18 Mars 2018
Le Derrick est une pompe à pétrole avec contrepoids qui permet de pomper du pétrole avec peu d'énergie elle est inspirée d'une pompe à bras égyptienne le chadouf.
Le chadouf (ou shadouf) est un appareil à bascule servant à puiser l'eau d'un puits, d'un point d'eau ou d'un cours d'eau. Il est employé en zone d'agriculture irriguée.
Le chadouf apparaît en Mésopotamie dès le IIIe millénaire avant notre ère. Il est ensuite employé en Égypte à partir du Nouvel Empire, vers -1501, après un changement climatique à la fin de l'Ancien Empire. Les crues baissant et les pluies se raréfiant, les Égyptiens ont été contraints de mettre au point un système d'irrigation sophistiqué afin de permettre un arrosage suffisant des champs.
En Égypte, la puisette utilisée pour recueillir l'eau s'appelle le delou.
La Description de l'Égypte suite à l'expédition napoléonienne présente plusieurs machines pour élever l'eau soient mues par la force humaine ou animale. Leur simplicité et leur ingéniosité frappent Nicolas-Jacques Conté qui retient le principe du balancier et celui de l'ouverture latérale pour présenter une machine hydraulique à l'Académie des Sciences en 1802.
L’origine des puits artésiens n’est pas aussi récente que pourrait le faire supposer leur nom, tiré de la province d’Artois. En France, c’est en effet dans la province d’Artois qu’ont été creusées les premières fontaines jaillissantes, et de là le nom qui a prévalu. Mais bien des siècles avant que la province d’Artois fût constituée, les peuples de l’Orient connaissaient l’art d’aller chercher dans les profondeurs de la terre l’eau des nappes invisibles, et de la faire monter à la surface du sol, où on l’employait pour tous les usages domestiques et pour les besoins de l’agriculture.
Les oasis qui parsèment les déserts de la Syrie, de l’Arabie et de l’Egypte, ne doivent leur fertilité qu’à des sources d’eaux jaillissantes pratiquées par la main de l’homme. Or, quelques-unes de ces oasis étaient déjà célèbres dans les premiers temps de l’ère chrétienne, ce qui fait remonter à une époque assez reculée l’origine des puits forés.
Certains passages d’anciens auteurs lèvent tous les doutes à cet égard.
Diodore, évêque de Tarse, qui vivait au ive siècle, s’exprime ainsi au sujet de la grande oasis, connue sous le nom de Thébaïde, qui servait de retraite aux anachorètes de ce temps :
« Pourquoi la région intérieure de la Thébaïde, qu’on nomme Oasis, n’a-t-elle ni rivière ni pluie qui l’arrosent, mais n’est-elle vivifiée que par le courant de fontaines qui sortent de terre, non d’elles-mêmes, non par des eaux pluviales qui pénètrent dans la terre et qui en remontent par ses veines, comme chez nous, mais grâce à un grand travail des habitants ? »
Un autre auteur, un peu moins ancien, cité par Photius et Niebuhr, corrobore la relation de l’évêque de Tarse. Olympiodore, qui florissait dans la savante école d’Alexandrie, vers le milieu du vie siècle après J.-C, rapporte qu’on creuse dans cette même oasis des puits de 200, 300 et même 500 coudées de profondeur, et que l’eau qui en sort est utilisée par les habitants pour l’irrigation de leurs terres. Diodore ajoute même que ces puits rejettent quelquefois des poissons.
Il existe encore aujourd’hui, dans les déserts de la Syrie et de l’Arabie, des fontaines artificielles qui datent de plusieurs milliers d’années. Leur ancienneté est attestée par leur nom, qui est emprunté au langage biblique. Il faut citer, dans cette catégorie, les fontaines d’Ismaël, de Bethsabée, de l’Abondance, du Jurement, de l’Injustice.
La mosquée de la Mecque renferme le puits de Zemzem, dont les eaux sont en grande vénération parmi les musulmans. Suivant la tradition, cette source jaillissante serait due à la puissante intervention de l’ange Gabriel, qui aurait ainsi apaisé la soif d’Agar et d’Ismaël errants dans le désert. Comblé et ignoré durant une longue suite de siècles, ce puits célèbre fut remis au jour par le grand-père de Mahomet, et c’est probablement à cette circonstance qu’il faut attribuer l’auréole de sainteté dont il est entouré.
Un de nos compatriotes, M. Ayme, directeur général des établissements métallurgiques du pacha d’Egypte, entreprit, vers 1850, de remettre en état les puits jaillissants qui avaient été construits dans les temps bibliques, et qui sont aujourd’hui obstrués par les sables. Nous empruntons à l’excellent ouvrage de MM. Degousée et Ch. Laurent, le Guide du sondeur, un fragment intéressant d’une lettre écrite à l’auteur de cet ouvrage, par M. Ayme :
« Les deux oasis de Thèbes et de Gharb sont, on peut s’exprimer ainsi, criblées de puits artésiens ; j’en ai nettoyé plusieurs : j’ai bien réussi, mais les dépenses sont grandes, par suite des quantités de bois dont il faut garnir toutes les ouvertures d’en haut, qui sont d’un carré de 6 à 10 pieds, pour éviter les éboulements. Ces ouvertures ont de 60 à 75 pieds de profondeur ; à ladite profondeur, on rencontre une roche calcaire sous laquelle se trouve une masse d’eau ou courant qui serait capable d’inonder les oasis, si les anciens Égyptiens n’avaient établi des soupapes de sûreté en pierre dure, de la forme d’une poire, armée d’un anneau en fer, pour avoir la facilité de la faire entrer et de la retirer au besoin de l’algue de la fontaine. L’algue, ainsi appelée par les Arabes, est le trou pratiqué dans le rocher calcaire, qui, suivant la quantité d’eau que l’on veut rendre ascendante, a de 4, 5 et jusqu’à 8 pouces de diamètre. »
M. Ayme a constaté que les anciens Orientaux s’y prenaient de la manière suivante, pour faire jaillir la nappe souterraine à la surface du sol.
Ils creusaient un puits carré, descendant jusqu’à une roche calcaire qui recouvre la masse d’eau souterraine ; puis ils le garnissaient d’un solide revêtement en planches, destiné à maintenir les terres. Ce travail, exécuté à sec, se faisait assez facilement.
On procédait ensuite à la perforation de la roche, soit au moyen de tiges de fer, soit à l’aide d’un gros bloc de même métal, attaché à une corde glissant sur une poulie. Cette dernière partie du conduit mesurait ordinairement de 300 à 400 pieds. On atteignait ainsi la nappe souterraine, qui, dans les cas dont il s’agit, se trouve être un véritable cours d’eau ; car on y rencontre du sable semblable à celui du Nil, et l’un des puits nettoyés par M. Ayme lui a fourni du poisson parfaitement mangeable.
L’écueil du système que nous venons de décrire, c’est que le revêtement intérieur du puits exécuté en bois, ne tardait pas à se pourrir, et que les terres latérales, faisant irruption, empêchaient bientôt l’arrivée de l’eau. C’est ainsi que se sont comblées la plupart des anciennes fontaines du désert africain. C’est de la même manière que se tarissent celles qui sont creusées par les Arabes, dans le Sahara algérien, à l’aide de procédés analogues, et sur lesquels nous appellerons l’attention du lecteur, dans l’un des chapitres qui termineront cette Notice.
M. Ayme a complètement transformé la partie de l’Egypte soumise à son administration. Les puits jaillissants qu’il a créés ou ressuscités, — c’est le mot vrai, — sont devenus autant de centres de population, dans lesquels le nom français jouit d’un haut prestige.
On dit communément que les puits artésiens étaient connus en Chine de temps immémorial, et que, sous ce rapport, comme sous bien d’autres, les habitants du Céleste Empire nous ont considérablement devancés. Cette assertion mérite d’être examinée avec soin.
C’est dans un Voyage pittoresque, publié à Amsterdam, vers les dernières années du xviie siècle, qu’on trouve la première mention des procédés de forage employés par les Chinois. On lit dans cet ouvrage :
« Les Chinois pratiquent des trous dans la terre, à de très-grandes profondeurs, à l’aide d’une corde armée d’une main de fer, laquelle rapporte au jour les détritus du fond. »
Les Lettres édifiantes renferment une lettre de l’évêque de Tabrasca, missionnaire en Chine, dans laquelle on remarque ce passage, qui s’applique aux puits forés de Ou-Tong-Kiao :
« Ces puits sont percés à plusieurs centaines de pieds de profondeur, très-étroits et polis comme une glace ; mais je ne vous dirai pas par quel art ils ont été creusés ; ils servent pour l’exploitation des eaux salés. »
Cette lettre, datée du 11 octobre 1704, ne donne aucun renseignement sur l’époque à laquelle on a commencé à creuser les puits chinois ; elle ne résout donc en aucune façon la question d’ancienneté.
Une relation beaucoup plus détaillée de la méthode chinoise, fut donnée en 1827, par un autre missionnaire, l’abbé Imbert. Voici cette description :
e.
« Il y a quelques dizaines de mille de ces puits salants dans un espace d’environ 10 lieues de long sur 4 ou 5 de large. Chaque, particulier un peu riche se cherche quelque associé et creuse un ou plusieurs puits. C’est une dépense de 7 à 8 000 francs. Leur manière de creuser ces puits n’est pas la nôtre. Ce peuple vient à bout de ses desseins avec le temps et la patience, et avec bien moins de dépense que nous. Il n’a pas l’art d’ouvrir les rochers par la mine, et tous les puits sont dans le rocher. Ces puits ont ordinairement de 1 500 à 1 800 pieds de profondeur, et n’ont que 5 ou au plus 6 pouces de largeur. Voici leur procédé : on plante en terre un tube de bois creux, surmonté d’une pierre de taille qui a l’orifice désiré de 5 ou 6 pouces ; ensuite on fait jouer dans ce tube un mouton ou tête d’acier, pesant de 300 à 400 livres. Cette tête d’acier est crénelée en couronne, un peu concave par-dessus et ronde par-dessous. Un homme fort, habillé à la légère, monte sur un échafaudage, et danse toute la matinée sur une bascule qui soulève cet éperon à 2 pieds de haut, et le laisse tomber de son poids ; on jette de temps en temps quelques seaux d’eau dans le trou pour pétrir les matières du rocher et les réduire en bouillie. L’éperon ou tête d’acier est suspendu par une bonne corde de rotin, petite comme le doigt, mais forte comme nos cordes de boyau. Cette corde est fixée à la bascule ; on y attache un bois en triangle, et un autre homme est assis à côté de la corde. À mesure que la bascule s’élève, il prend le triangle et lui fait faire un demi-tour, afin que l’éperon tombe dans un sens contraire. À midi, il monte sur l’échafaudage, pour relever son camarade jusqu’au soir. La nuit, deux autres hommes les remplacent. Quand ils ont creusé 3 pouces, on tire cet éperon avec toutes les matières dont il est surchargé (car je vous ai dit qu’il était concave par-dessus), par le moyen d’un grand cylindre qui sert à rouler la corde. De cette façon, ces petits puits ou tubes sont très-perpendiculaires et polis comme une glace. Quelquefois tout n’est pas roche jusqu’à la fin, mais il se rencontre des lits de terre, de charbon, etc. ; alors l’opération devient des plus difficiles, et quelquefois infructueuse ; car, ces matières n’offrant pas une résistance égale, il arrive que le puits perd sa perpendiculaire ; mais ces cas sont rares. Quelquefois le gros anneau de fer, qui suspend le mouton, vient à casser ; alors il faut cinq ou six mois pour pouvoir, avec l’autre mouton, broyer le premier et le réduire en bouillie. Quand la roche est assez bonne, on avance jusqu’à deux pieds dans les vingt-quatre heures. On reste au moins trois ans pour creuser un puits. Pour tirer l’eau, on descend dans le puits un tube de bambou, long de 24 pieds, au fond duquel il y a une soupape ; lorsqu’il est arrivé au fond du puits, un homme fort s’assied sur la corde et donne des secousses, chaque secousse fait ouvrir la soupape et monter l’eau, le tube étant plein, un grand cylindre, en forme de dévidoir, de 50 pieds de circonférence, sur lequel se roule la corde, est tourné par deux, trois ou quatre buffles ou bœufs, et le tube monte ; cette corde est aussi de rotin. L’eau est très-saumâtre ; elle donne à l’évaporation un cinquième et plus, et quelquefois un quart de sel. Ce sel est très-âcre et contient beaucoup de nitre. »
L’abbé Imbert ajoutait que la plupart de ces puits dégagent de l’air inflammable, c’est-à-dire de l’hydrogène carboné, ou du grisou, provenant de gisements de houille traversés par le conduit. Quelques-uns de ces puits, appelés puits de feu par les Chinois, qui descendaient jusqu’à une profondeur de 3 000 pieds, ne fournissaient même que du gaz inflammable. Le gaz était employé à faire évaporer dans des chaudières de fer les eaux contenant le sel. Nous avons déjà rappelé ce dernier fait dans la Notice sur l’éclairage qui fait partie de ce volume.
La relation du missionnaire Imbert fut fort attaquée par les savants, entre autres par M. Héricart de Thury, ingénieur, qui était alors l’homme le plus compétent sur la matière. M. Héricart de Thury déclara qu’il était impossible de creuser la terre à une profondeur de 3 000 pieds, par le procédé chinois.
Le supérieur de la mission chinoise ayant fait part de ces critiques à l’abbé Imbert, celui-ci se rendit dans la région des puits de sel, pour vérifier l’exactitude de ses chiffres, et voici ce qu’il écrivait dans une seconde lettre :
« J’ai mesuré la circonférence du cylindre en bambou sur lequel s’enroule la corde qui remonte les instruments du fond du puits, j’ai mesuré le nombre de tours de cette corde. Le cylindre a 50 pieds de tours, et le nombre de tours de la corde est de 62. Comptez vous-même si cela ne fait pas 3 100 pieds ; ce cylindre est mis en mouvement par deux bœufs, mis à un manège ; la corde n’est pas plus grosse que le doigt, elle est faite en lanières de bambou et ne souffre pas de l’humidité. »
Les Chinois emploient au moins trois ans à creuser un puits, par le procédé qui vient d’être indiqué. Comme le dit l’abbé Imbert, quand la roche est bonne, c’est-à-dire quand elle n’est pas trop mélangée de lits de terre, de charbon ou d’autres matières susceptibles de s’ébouler, le travail avance de 2 pieds par 24 heures.
Les détails que donne l’abbé Imbert sur la manière d’élever l’eau, prouvent surabondamment que les puits à sel des Chinois ne sauraient être assimilés à nos puits artésiens, puisque l’eau n’y jaillit pas, lorsque le forage est terminé.
Ce missionnaire nous apprend, en effet, que, pour amener l’eau à la surface du sol, on descend dans le puits un tube de bambou, de 24 pieds de long, muni d’une soupape à son extrémité inférieure. Le tube étant arrivé au fond du puits, un homme vigoureux donne de violentes secousses à la corde (fig. 336). À chaque secousse, la soupape s’ouvre, et l’eau monte dans le tube. Lorsque le tube est plein, on le hisse en faisant tourner par des bœufs un grand cylindre sur lequel s’enroule la corde.
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Fig. 336. — Chinois creusant un puits pour l’extraction de l’eau salée.
De ce qui précède, il résulte donc : 1° que les puits à sel des Chinois n’ont rien de commun avec nos puits artésiens, si ce n’est leur grande profondeur ; 2° qu’on ne peut fixer avec certitude l’époque à laquelle remonte leur invention.
Ces réserves posées, il faut reconnaître que les procédés de forage des Chinois ne manquent pas de mérite dans leur simplicité ; mais nous avons déjà dit et nous aurons occasion de répéter, qu’ils ne sont applicables qu’à une certaine nature de terrains. De là l’insuccès qu’ont éprouvé en Europe plusieurs tentatives faites pour le sondage à la corde.
Il est probable que les puits artésiens furent connus en Italie à une époque fort ancienne. En effet, d’après un récit de Bernardini-Ramazzini, les fouilles pratiquées dans la ville antique de Modène, ont plusieurs fois mis à jour des tuyaux de plomb, qui communiquaient avec des puits abandonnés.
« Or, dit Arago dans sa Notice sur les Puits forés, quel aurait pu être l’usage de ces tuyaux, si ce n’eût été d’aller chercher à 20 ou 25 mètres de profondeur, c’est-à-dire fort au-dessous des eaux de mauvaise qualité et insalubres, résultant des infiltrations locales, la nappe limpide et pure qui alimente toutes les fontaines de la ville moderne ? »
Au reste, dès le commencement des temps modernes, la ville de Modène avait déjà retrouvé la tradition ancienne, et elle possédait des puits artésiens, comme le prouvent ses armes, composées de deux tarières de fontainier.
Avant de se rendre en France, sur l’invitation de Louis XIV, c’est-à-dire vers le milieu du xviie siècle, Dominique Cassini avait fait creuser, au fort Urbain, un puits dont l’eau s’élançait jusqu’à 5 mètres au-dessus du sol. Lorsqu’on forçait cette eau à monter dans un tube, elle s’élançait jusqu’au faîte des maisons. Cassini a même laissé une description des procédés qui étaient mis en œuvre de son temps, par les habitants du territoire de Modène et de Bologne, pour faire jaillir l’eau des entrailles de la terre. Il dit qu’on applique sur les parois intérieures du trou de sonde « un double revêtement dont on remplit l’entre-deux d’un corroi de glaise bien pétrie. » Lorsqu’on est arrivé à la nappe souterraine, l’eau sort avec impétuosité par l’ouverture qu’a pratiquée la tarière. Elle monte à l’orifice supérieur du puits et sert à arroser les campagnes voisines.
« Peut-être, dit Cassini, ces eaux viennent-elles par des canaux souterrains du haut du mont Apennin qui n’est qu’à 40 milles de ce territoire. »
Cassini ajoute que, dans la Basse-Autriche, au milieu des montagnes de la Styrie, les habitants obtiennent de l’eau par une méthode analogue.
En France, les puits artésiens furent signalés pour la première fois, en 1729, par Belidor, dans son ouvrage intitulé la Science des ingénieurs.
« Il se fait, dit cet auteur, une sorte de puits appelés puits forés, qui ont cela de particulier que l’eau monte d’elle-même à une certaine hauteur, de sorte qu’il ne se faut donner aucun mouvement pour l’avoir, que la peine de puiser dans un bassin qui la reçoit. Il serait à souhaiter que l’on en pût faire de semblables en toutes sortes d’endroits, ce qui ne paraît pas possible, parce qu’il faut des circonstances du côté du terrain qui ne se rencontrent pas toujours. »
Cependant, à l’époque où Belidor écrivait son ouvrage, les puits forés étaient déjà connus en France depuis plusieurs siècles. Le plus ancien puits foré remonte, dit-on, à 1126. Il est situé à Lilliers (Pas-de-Calais), dans le vieux couvent des Chartreux.
Les sondages se pratiquent dans l’Artois avec une telle facilité, qu’en certaines localités chaque maison possède une fontaine jaillissante. Il suffît de creuser la terre à 15 ou 20 pieds, pour avoir de l’eau. L’instrument qu’on emploie pour ce travail, est fort grossier : il se compose d’une longue perche, terminée par une sorte de gouge en fer. Il y a loin de là aux forages gigantesques qui ont été exécutés de nos jours, à Paris et ailleurs.
Le premier puits artésien creusé dans le département de la Seine, date de 1824. Il fut percé à Enghien, par Péligot. Depuis cette époque, l’art des sondages a fait d’immenses progrès ; de grands perfectionnements ont été introduits dans les engins mécaniques, et les puits artésiens se sont multipliés d’une manière très-rapide.
Gabian est une commune de l’Hérault. On fait remonter aux premiers siècles de notre ère la mise à jour, par les romains, d’une source de cette "huile de pierre" semblable à celle que leurs médecins utilisaient déjà pour soigner de l’arthrose et de diverses maladies de la peau. Avec des fortunes diverses, la tradition avait traversé les siècles. En 1752 paraissait à Bézier un "Mémoire sur l’huile de Pétrole en général et particulièrement sur celle de Gabian". Lu à l’Académie des Sciences et Belles Lettres de Béziers, approuvé par l’Université de Médecine de Montpellier, il avait été publié sous l’autorité de l’évêque et seigneur de Bézier qui entendait bien tirer bénéfice de cette source. En effet, nous disait l’auteur du mémoire, une rumeur avait couru qui affirmait que cette source était abandonnée, il convenait donc "d’informer le public que ce baume minéral coule depuis quelque temps avec assez d’abondance pour en fournir, non seulement à tout le royaume, mais encore aux pays étrangers, par les dépenses qu’a faites M. De Bosset de Roquefort, Evêque de Béziers, Seigneur de Gabian, pour remettre cette Fontaine en état".
Et pour éviter toute falsification il était ajouté que le prélat avait pris des précautions qui consistaient "à faire recueillir cette Huile par une personne de qualité éprouvée qui a ordre de la mettre dans des bouteilles de différentes grandeurs, de sceller ces bouteilles du Sceau de ses Armes et de signer l’étiquette qu’on y met dessus ; de sorte qu’à présent on est assuré d’avoir, quand on veut, de l’Huile de Pétrole toute pure et telle qu’elle coule naturellement de la source".
Excellente publicité. De telles précautions suggéraient, à elles seules, que le précieux élixir possédait de fabuleuses propriétés.
Le texte reprenait un Mémoire publié en 1717 par M. Rivière, médecin et membre de la Société Royale des Sciences de Montpellier. Le Grec Dioscoride (40-90), l’un des pères reconnus de la pharmacologie était d’entrée mis à contribution. Le Naphte (terme d’origine grecque pour désigner le bitume), affirmait-il "est très efficace contre les vapeurs de Mères et contre les relâchements de l’utérus, soit en parfum soit en liniment. Cette huile prise avec du vin et du castoreum (sécrétion produite par les glandes sexuelles du castor) provoque les Mois aux femmes. Elle est d’un grand secours dans les vieilles toux et dans les difficultés de respirer. Elle remédie aux morsures de serpent, aux douleurs de sciatique et aux points de côté. Prise en bol elle apaise des maux d’estomac et avalée dans du vinaigre elle dissout le sang caillé ; Délayée dans de l’eau d’orge et prise en lavement elle guérit la dysenterie. En parfum elle soulage ceux qui sont enrhumés et appliquées sur les dents elle apaise la douleur. Enfin si on l’applique avec de la farine de la cire et du nitre elle est merveilleuse contre la léthargie et les douleurs de goutte et de sciatique".
Et si ce n’était pas encore assez, l’auteur ajoute que Pline (23-79) lui attribue aussi la propriété de "guérir la lèpre, les dartres et les démangeaisons, d’arrêter le sang, de réunir les plaies et de les consolider".
Avec une telle introduction, digne des meilleurs bateleurs de foires, le succès était assuré.
Mais les auteurs du 18ème siècle n’ignorent pas, non plus, que dans certains pays lointains l’huile de pétrole sert à un usage bien plus matériel. "Ce bitume liquide, nous dit Valmont-Bomare, sert à éclairer en Perse et plusieurs autres lieux, mais notamment à Bakou, ville située sur la mer Caspienne, à trois milles d’Astracan, où il n’y a point de bois. On y fait un commerce si considérable de pétrole, qui s’y puise dans plus de vingt puits, que le souverain, c’est-à-dire le Khan de Bakou, en retire annuellement de droit régalien 40 000 roubles, ce qui fait environ 200 000 livres argent de France". Déjà un Prince du Pétrole et des pétroroubles avant les pétrodollars.
Quel usage pour ce pétrole ? "On le brûle dans les temples et les maisons , dans des lampes garnies de mèches grosses comme le pouce. Quelques voyageurs assurent qu’on brûle plus de cette huile minérale que de chandelles à Bagdad. On s’en sert aussi au lieu de bois : pour cet effet on jette deux ou trois poignées de terre dans l’âtre de la cheminée, on verse ensuite l’huile minérale par-dessus, puis on allume avec un bouchon de paille, et sur-le-champ il en résulte une flamme assez vive ; plus on agite et retourne la terre imbibée et mieux elle brûle : il en sort une vapeur bleuâtre, d’une odeur plus ou moins disgracieuse et la fumée noircit entièrement les habitations ; cependant on prétend que les aliments n’en contractent absolument aucun mauvais goût".
N’oublions pas non plus que nous sommes en Perse et que les vieux cultes du feu n’y sont pas encore éteints : "Les Gaures (mot d’origine arabe signifiant infidèle, traduit également par Guèbres) et les Persans qui adorent le feu et qui suivent la religion de Zoroastre leur instituteur, viennent à Bakou pour rendre leur culte à Dieu qu’ils adorent sous l’emblème du feu ; la flamme du pétrole allumé est pour eux le feu éternel et le Soleil, le symbole le plus frappant de la Divinité".
Un siècle plus tard, le feu de Zarathushtra brûle à présent dans les plus banales lanternes et les temples du feu sont essentiellement visités par les touristes.
La lampe à pétrole, symbole du confort bourgeois du 19ème siècle (Illustration de Germinal).
En 1859 Edwin Laurentine Drake, dit "le colonel", recueillait du pétrole, à Titusville en Pennsylvanie, dans un forage d’une dizaine de mètres de profondeur. La technique était nouvelle en Amérique où le pétrole était généralement recueilli dans des écoulements de surface.
La nouvelle provoquait une véritable ruée vers l’or noir. Pierre Juhel, dans son "Histoire du Pétrole" (Vuibert, 2011), cite un journal local : "Une nuée d’aventuriers s’est abattue sur cette nouvelle terre promise et a entrepris des forages de tous côtés. Aucun placement, en effet, ne saurait être plus lucratif. Le centre de la région ainsi exploitée est Clintock à 12 milles de Titusville […] On ne voit de tous côtés que des charpentiers occupés à construire des huttes, des hangars et des granges qui ne tarderont pas à faire place à une ville florissante".
La "ferme de la veuve Mac Clintock" est restée célèbre dans la saga pétrolière. En 1863, une nappe jaillissante y donna 1000 barils d’huile par jour et dès l’année suivante la propriétaire du terrain percevait 2000 dollars de royalties par jour pour les puits présents sur sa terre. Cette femme avait conservé l’habitude d’attiser son feu de bois avec du pétrole, dangereuse méthode, elle en mourut brûlée. Son fils adoptif, John Steel, âgé de 20 ans héritait d’une fabuleuse fortune qu’il dilapida de façon extravagante. Ce qui lui valut d’entrer dans la légende sous le nom de "Coal oil Johnny", Jean du pétrole.
Après la Pennsylvanie, un nouvel eldorado allait naître en Californie. Dans les années 1880, la région de Los Angeles respirait le parfum des orangers et des citronniers. On y venait des régions froides du Nord Américain pour y passer des hivers ensoleillés, ce qui alimentait une spéculation immobilière. L’un de ces promoteurs avait vu trop grand et plusieurs des propriétés mises en vente se trouvèrent sans acquéreur. Les administrateurs de la société se souvinrent alors d’anciennes prospections qui avaient révélé des traces de pétrole dans le secteur.
Après plusieurs essais infructueux, vient la nuit du 15 au 16 juillet 1894. Une énorme explosion souterraine éveille les habitants qui croient avoir affaire à un tremblement de terre. Une véritable trombe de pétrole sort du puits, entrainant avec elle les déblais, les outils et même d’énormes blocs de pierre. L’odeur du pétrole remplace celle des orangers.
Puits jaillissant de pétrole. Louis Figuier, les Merveilles de la Science, 1870.
Après avoir tenté de faire boucher le puits, la municipalité de Los Angeles mesurait tout l’intérêt de la découverte. Bientôt l’entreprise de promotion immobilière se transformait en compagnie pétrolière, la Californian Oil Company, pendant qu’à la place des citronniers se dressait une forêt de derricks et d’éoliennes actionnant les pompes des puits. A la fin de l’année 1895, quatre cents compagnies différentes exerçaient leurs activités autour de Los Angeles. La Santa Fe Terminal Railroad avait poussé ses voies ferrées jusqu’au pied de chaque puits et arrosait tout le pays jusqu’aux ports qui transportaient le pétrole vers l’Europe. Des fortunes immenses se construisaient en très peu de temps et le pétrole méritait bien alors son nom "d’or noir".
Nous avons déjà rencontré les mines de Pechelbronn (ou Backelbrunn), en Alsace, exploitées depuis Louis XV pour son asphalte. Un article de la revue La Nature, de 1890, nous décrit un paysage bien modifié. Une pointe de nostalgie d’abord : on y signale que "Pechelbronn, dont le nom allemand signifie la Fontaine de la Poix, est une annexe de la commune de Merkweiler, dans notre ancien département du Bas-Rhin, au pied des Basses Vosges". La guerre de 1870 entre la France et la Prusse a déplacé les frontières. Celle qui se prépare déjà, et qui éclatera quatorze ans plus tard, aura également des liens avec le charbon et le pétrole.
Mais revenons au Pechelbronn de 1890. L’auteur de l’article nous invite à une visite guidée : "En regardant autours de vous, dans la localité, vous voyez du bitume noir, d’une consistance huileuse, surnager au-dessus des rigoles, à travers les prairies… Une villa, habitée par la famille Lebel, propriétaire des exploitations de pétrole, s’élève au bord de la route de Lampersloch à Soulz-sous-Forêt, entourée de raffineries d’huile minérale, avec leurs grandes cheminées fumeuses. Dans la prairie, pointent de distance en distance des pyramides en Planche, pareilles à des flèches de clocher sans tour, mais contre lesquelles s’adossent de petites maisonnettes en planche également. Ce sont les abris des sondages pour la recherche du pétrole jaillissant".
Puits de Pétrole à Pechelbronn, d’après une photographie. La Nature, 1890.
Dans le paysage se trouvent aussi les installations pour la distillation du pétrole. Suivant la densité des produits obtenus, par rapport à l’eau, on distingue la gazoline (0,670), la benzine (0,690 à 0,700), le naphte (0,715), la ligroïne (0,725), le pétrole lampant (0,800 à 0,810), les huiles légères (jusqu’à 0,850) et les huiles lourdes (0,850 à 0,890) pour le graissage. En cette fin de 19ème siècle, les essences de pétrole, benzine et gazoline, sont considérées comme des déchets peu utiles. Trop volatils et trop inflammables, elles étaient trop dangereuses pour l’éclairage. Seule la célèbre et robuste lampe "pigeon" y était adaptée. Dix ans plus tard, ces "déchets" allaient révéler leur valeur marchande.
Publicité pour le pétrole de Pechelbronn. La Vie en Alsace, 1933.
Privé de l’Alsace, le gouvernement français encourageait alors la prospection sur d’autres secteurs du territoire. Avec le retour de la fièvre pétrolière dans notre France contemporaine, un coup d’œil rétrospectif sur les sites visités, ne manque pas d’intérêt.
Premier vieux souvenir, Gabian et son pétrole-médicament authentifié par le sceau de l’évêque de Béziers. Un sondage jusqu’à 413 mètres ne donne aucun résultat, sinon un peu de gaz.
Ensuite Grenoble, ou plutôt, à proximité, la commune de Saint-Barthélémy sur Gua où brûle la "fontaine ardente". Des émanations de méthane sortent pas des fissures du sol et s’enflamment, un indice prometteur. Hélas, après un sondage à 198 mètres le pétrole n’est toujours pas là. Aujourd’hui la fontaine ardente, qu’une publicité touristique considère comme l’une des 7 merveilles du Dauphiné, brûle encore et mérite la visite, même si certains amateurs regrettent un aménagement du site peu respectueux de l’environnement naturel.
Dans la Limagne d’Auvergne des indices également existent. Ici et là sourdent des sources de bitume. Le Puy de la Poix, volcan érodé qui possède une source régulièrement exploitée, mérite bien son nom. Elle suinte encore aujourd’hui et est remise en valeur par des défenseurs éclairés du patrimoine.
Ces sondages de 1893 ne connaissent pas le succès. Ce qui n’empêchera pas d’autres tentatives entre 1919 et 1922. En 1919, un forage près de la mine de bitume de Pont-du-Château déclenche un phénomène spectaculaire au moment où la sonde atteint 415 mètres. Sous la pression des gaz libérés, de véritables geysers sortent du tubage de la sonde. Dans une "Note sur les recherches de pétrole dans la Limagne", Philippe Glangeaud, professeur de géologie à l’université de Clermont-Ferrand, témoigne :
"Le 21 décembre, à minuit trente, alors que l’on remontait un taraud, se produisit une violente explosion qui réveilla tous les habitants de Martres-d’Artrières. Le geyser venait d’entrer de nouveau en activité et de projeter, hors du trou, 180 mètres de tiges qui traversèrent le toit de la tour et tombèrent dans le ruisseau voisin entrainant le taraud avec elles.
Le poids de ce projectile d’un nouveau genre atteignait 2500 kilogrammes et mesurait 180 mètres de long. C’est, je crois, un record de projection de geyser. Il n’y eut heureusement aucun accident humain". (La Nature, 1893)
Hélas de ce puits ne jaillira pas du pétrole mais "du sable et du bitume dans lequel s’enlisaient les visiteurs qui s’approchaient de trop près pour observer le phénomène". Après avoir éjecté plusieurs centaines de kilogrammes de bitume par jour, le forage ne donne bientôt plus que de l’eau chargée de gaz carbonique qu’une société, la Carbonique d’Aigueperse, entreprit d’exploiter. La Limagne ne verra donc pas se dresser des derricks sur son sol. Elle figure encore actuellement cependant sur la carte des zones vouées à la recherche de pétroles "non conventionnels".
Ayant perdu l’Alsace, la France fait donc piètre figure dans le domaine de la production pétrolière. C’est ce que révèle l’Exposition Universelle de 1889 à Paris.
L’exposition de 1889 à Paris, pour le centenaire de la révolution française, a été d’abord une vitrine pour le charbon, l’acier, la vapeur et l’électricité naissante. L’industrie pétrolière n’a cependant pas été oubliée. L’initiative de sa mise en scène est due à la famille Deutsch, industriels français spécialisés dans le raffinage du pétrole. Dans un vaste réservoir servant au stockage du pétrole était disposé un diaporama représentant l’industrie pétrolière dans le monde.
"A notre époque où la lumière est devenue pour tous un besoin impérieux et une condition de bien-être, il est fort intéressant de suivre dans sa production, ou plutôt dans son élaboration, le pétrole qui a su prendre rang et le conserver à côté du gaz et de l’électricité. C’est ce que nous montre le panorama". (LaNature, 1889). L’éclairage est donc bien, pour le moment, l’intérêt principal du pétrole.
A vrai dire, seules deux régions étaient représentées sur ce diaporama : les Etats-Unis et le Caucase. Mais comment se forme ce pétrole ?
Panorama du pétrole à l’Exposition Universelle de Paris en 1889. La Nature, 1889.
L’article de La Nature évoque la polémique du moment : "Le chimiste allemand Engler en fait remonter la production à la décomposition lente de végétaux et d’animaux antédiluviens ; Berthelot et Mendeleïev l’attribuent à des réactions chimiques résultant de phénomènes volcaniques".
Neptuniens d’un côté (décompositions d’organismes végétaux dans la mer), Plutoniens de l’autre (origine volcanique), le débat est d’importance.
Les producteurs américains alimentent une campagne de dénigrement à l’encontre des gisements de Bakou. Ils sont en cours d’épuisement, disent-ils. Mendeleïev, célèbre pour la mise au point du tableau périodique des éléments chimiques, est aussi directeur des mines du Caucase et réplique immédiatement : le Caucase est en mesure d’alimenter le monde entier pour tous les usages. D’ailleurs, affirme-t-il, les réserves de pétrole sont inépuisables. Sous l’écorce, la matière terrestre serait constituée de carbures métalliques, particulièrement de fer. A travers les failles de la croûte, de l’eau s’infiltrerait qui réagirait avec ces carbures en donnant des oxydes et des carbures d’hydrogène qui, en remontant vers la surface, se combineraient pour donner les différents composés du pétrole. Alors pas d’inquiétude, là où le pétrole sort il continuera à sortir.
Même si la thèse du pétrole issu de la fossilisation de matières organiques l’a emporté, des scientifiques défendent, encore aujourd’hui, la possibilité de pétrole "abiotique".
Indifférent à l’aspect théorique de la querelle, le rédacteur de l’article de la Nature semble, pour sa part, pencher pour le pétrole russe. Il aurait, sur les pétroles américains, l’avantage "de contenir de la benzine, de l’anthracène et de l’huile d’anthracène, c’est-à-dire les mêmes principes précieux que le goudron de houille, permettant d’obtenir la gamme prestigieuse des matières colorantes dont l’industrie des teintures fait actuellement un si grand usage. C’est pour le pétrole russe un appoint dont on ne saurait calculer les conséquences".
L’exposition se veut didactique. On y représente "les énormes canalisations de tuyaux ou pipe-lines qui, au Caucase et aux Etats-Unis surtout, s’étendent sur des longueurs étonnantes". Le plus long, celui de Philadelphie, fait, à lui seul, 372 kilomètres de longueur. Ces tuyaux alimentent des réservoirs de fer de 4500 à 6000 hectolitres de capacité, semblables à celui où se tient l’exposition.
Pour ce qui est de l’expédition, le temps est venu des bateaux-citernes (tank-steamers ou tank-ships) qui peuvent transporter jusqu’à 32 000 tonnes de pétrole. Ils remplacent peu à peu les antiques navires où le pétrole était contenu dans de petits tonneaux de bois, des "barils". Ce conditionnement en "barils" est issu des méthodes utilisées à Pechelbronn au 18ème siècle et importées aux USA. Le baril de 42 gallons américains, soit environ 159 litres, est resté la mesure internationale pour les transactions pétrolières.
Ces pétroliers d’un nouveau genre sont-ils plus sûrs ? On se souvient encore, au moment où se tient l’exposition, de l’explosion survenue dans le port de Calais le 16 octobre 1888.
Le pétrolier Ville-de-Calais est "un superbe navire jaugeant 1221 tonneaux, construit en acier et pourvu de puissantes machines, les quelles étaient placées tout-à-fait à l’arrière, de façon à ce que les chaudières fussent bien isolées de la partie du navire contenant le pétrole" (revue La Nature, 1888) . Pourtant, en ce jour néfaste, le pétrolier ayant livré son chargement se préparait à appareiller vers New-York puis Philadelphie quand le capitaine en second et le troisième mécanicien descendirent inspecter la cale. "Quelques instants après, une immense colonne de feu s’éleva à plus de 100 mètres et fut suivie d’une formidable détonation. On suppose que l’un de ces malheureux aura voulu enflammer une allumette qui aura mis le feu au gaz de pétrole resté dans l’un des compartiments.
Le choc produit a été tel que la plupart des rues de l’ancien Calais se sont trouvées jonchées d’éclat de vitres. A Saint-Pierre-lès-Calais, la secousse s’est faite tellement sentir, que dans plusieurs maisons les portes se sont ouvertes et que le gaz s’est éteint. Le bruit de l’explosion s’est étendu jusqu’à Boulogne et Douvres. Toutes les rues de calais ont été jonchées d’éclats de verre ; des plaques de tôle ont été arrachées au navire et projetées à plus de 500 mètres de distance. Le cadran de l’hôtel de ville s’est fendu".
L’explosion du Ville-de-Calais, La Nature, 1888.
Le bilan humain est de trois morts. Quant au bilan écologique, il n’est pas encore à l’ordre du jour. Il faudra attendre la fin du 20ème siècle et des accidents majeurs comme ceux de l’Amoco Cadiz ou de l’Erika pour qu’on commence vraiment à s’inquiéter des pollutions marines provoquées par les dégazages et les échouages.
Déjà, en 1889, se dessine un usage étendu du pétrole. D’abord l’éclairage domestique ou encore celui des phares. Ensuite le chauffage industriel, le graissage des machines, le traitement des laines cardées, la fabrication de tissus caoutchoutés, l’imperméabilisation des tissus, la teinture, la parfumerie, la photographie et même le traitement du phylloxera ou la lutte contre les invasions de criquets en Algérie.
Mais s’annonce un nouveau débouché : "le mélange d’air et d’essence ou gazoline, est employé dans des moteurs spéciaux, système Otto, Lenoir, Rouart, Benz, Salomon et Tenting, Panhard et Levassor, Diederich, Noël, Forest, etc., pour produire la force motrice. Le principe consiste à fabriquer, de toutes pièces, un gaz détonnant analogue au gaz d’éclairage et que l’on utilise à peu près de la même façon".
Il existait déjà des moteurs fonctionnant au gaz d’éclairage issu de la distillation de la houille, mais ils étaient nécessairement fixes. Avec les essences de pétrole et l’invention du carburateur, ces moteurs pouvaient équiper des automobiles. Bientôt l’essence de pétrole ne sera plus un déchet encombrant mais un produit de grande valeur.
MÉTALLURGIE
La métallurgie est la science du travail avec les métaux. Il comprend l'extraction, le raffinage et le traitement du minerai (métaux contenant de la roche brute) et la transformation du métal en objets utiles et beaux. Parce que c'est un travail lourd avec des exigences spéciales, la métallurgie implique également l'ingénierie, la chimie et le contrôle du feu.
La péninsule ibérique, avec son paysage méditerranéen varié, a longtemps été un centre minier. Déjà à l'époque romaine, l'argent, l'or, le fer, le plomb, le cuivre, l'étain et d'autres métaux ont été exploités en Espagne. La renaissance de ces mines pour l'argent, l'or, le fer, le plomb, le cuivre, l'étain et le cinabre (minerai de mercure) les a laissés avec leurs noms arabes, tels qu'Almadén et Aljustrel. Selon les géographes andalous et d'autres documents, l'exploitation minière était complète, avec des mines à Jaen et Algrava pour l'or et l'argent, Córdoba pour le fer et le plomb, Malaga pour les rubis, Toledo et Murcia pour le fer. L'Espagne était une source majeure d'extraction de mercure, comme l'a noté le géographe al-Idrisi.
Les techniques d'extraction exigeaient aussi des moyens de forer dans la roche et d'extraire l'eau des mines en utilisant des pompes, en pompant l'air et en évacuant les gaz dangereux. Plusieurs modèles différents de l'ingénieur musulman al-Jazari du 13ème siècle, comme celui de gauche, ont utilisé des systèmes d'engrenage et d'aspiration pour évacuer l'eau du sous-sol en toute sécurité. L'écrivain al-Qazwini (1203-1283 EC) a décrit de telles pompes à trois étages utilisées dans les mines d'argent au Maroc.
Les minerais métalliques nécessitent un traitement pour purifier ou raffiner le métal, en séparant les métaux qui se trouvent souvent ensemble dans la roche. Cela nécessitait une connaissance et une expérience des fours de construction qui pouvaient atteindre et maintenir des températures très élevées, et dont les substances chimiques se combinaient avec les minéraux indésirables, laissant le métal pur derrière lorsqu'il était brûlé ou chauffé en présence du minerai métallique. Certains des écrivains les plus célèbres à ce sujet étaient al-Biruni (973-1048 CE), al-Kindi (environ 801-873 EC), et Jabir ibn Hayyan (vers 815 CE), qui ont travaillé pour rassembler et enregistrer cette information à travers Afroeurasia. Ces ouvrages utiles étaient disponibles dans les bibliothèques d'Al-Andalus, et beaucoup ont été traduits en latin. Combinés avec les connaissances européennes, ils ont jeté les bases de la métallurgie industrielle moderne.
La production de fer et d'acier a été réalisée à Tolède et dans d'autres centres espagnols en utilisant des techniques apportées de l'Inde, de la Perse et de Damas - le fameux acier damasquiné ou arrosé pour les épées, les armures et les outils. Le géographe Ibn Hawqal a écrit: "Tolède, comme Damas, était connue dans le monde entier pour ses épées."
Un historien écrit que l'art de l'incrustation d'acier et d'autres métaux avec des décorations en or et en argent a prospéré dans plusieurs centres européens et espagnols et a laissé des mots tels que «damascène» dans les vocabulaires anglais, français et latins. L'armure et la coutellerie étaient également décorées à l'aide de techniques telles que la dorure, l'incrustation, l'incrustation d'or et d'argent, ainsi que le sertissage et l'émaillage des bijoux. Le laiton était également produit dans de nombreux centres comme Almería, où chandeliers, brûleurs d'encens, assiettes, lampes, clés et serrures, et autres produits ordinaires et de luxe servaient les besoins des clients.
Les glaçures développées pour l'industrie de la céramique et les fixateurs pour les textiles - tels que l'alun - nécessitaient également des produits chimiques à base d'oxydes métalliques. Les glaçures de cuivre et d'or ont exigé le métal pur, comme dans les céramiques de lustre, particulièrement le lustre d'or. Le zinc est un métal utilisé dans les médicaments et à d'autres fins, qui a également été extrait en Espagne.
Influences durables: L'ingénierie et la chimie de la métallurgie sont des arts industriels essentiels à la création du monde moderne. Ces arts se sont développés au fil des siècles dans de nombreux pays, mais les écrits sur l'étude de la chimie et du comportement des éléments, ainsi que l'expérience des artisans du métal, assuraient un lien certain entre la civilisation islamique et l'Europe pendant la période pré-moderne. .
L'héritage de l'exploitation minière par les Espagnols dans le Nouveau Monde est une histoire de pillage, mais c'est aussi une partie de l'histoire économique mondiale. Lorsque les Espagnols ont conquis des territoires où il y avait des mines, ils avaient déjà accès aux technologies d'extraction et de traitement du minerai qui avait prospéré en Espagne. On pense que des artisans musulmans possédant ces connaissances ont été amenés en Nouvelle-Espagne, malgré l'interdiction de leur émigration, précisément parce que leurs compétences étaient nécessaires. La monnaie d'argent utilisant de l'argent américain a aidé à mondialiser la monnaie et le commerce au 16ème siècle, et a été expédiée à l'Empire Ottoman, au Japon et à la Chine, en plus de l'Europe.